La partialité de Moro serait mise en doute dans n’importe quel pays, selon Ferrajoli
Le juriste italien Luigi Ferrajoli, l’un des théoriciens les plus importants du « garantisme pénal », la garantie des droites fondamentaux, a déclaré que «la partialité explicite» de l’ex-juge Sergio Moro justifierait des soupçons dans n’importe quel pays du monde. La déclaration a été faite dans une interview publiée par l’édition de la Folha de S. Paulo ce samedi (7/25).
Dans ce journal, l’ancien juge et professeur émérite de philosophie du droit à l’Université Roma Tre a critiqué ce qu’il considére comme une confusion évidente entre le parquet et le juge lors de la conduite du “lava jato”; il a déclaré que l’affaire Lula a fait passer l’ « opération mains propres» comme présentant toutes les garanties du droit ; et que le tribunal du jury n’est pas une procédure équitable pour poursuivre les personnes accusées de crimes graves.
« Dans le cas de la condamnation de l’ancien Président Lula, les violations des garanties d’une procédure régulière ont été, dès le début, massives. Dans tout autre pays, le comportement du juge Moro justifierait des soupçons, en raison de son manque explicite d’impartialité parce qu’il avait anticipé le jugement», a-t-il dit.
Pour lui, nul doute que les procès italiens du début des années 90 ont certainement commis des «excès anti-garantistes», comme l’abus des prisons préventives et le rôle excessif de la figure du delateur.
Cependant, poursuit-il, comparé aux performances de Moro et des procureurs du MPF à Curitiba, les procès en Italie “semblent être un modèle de garantie”. «Il n’y a jamais eu de confusion entre le juge et l’accusation: les limitations de liberté dans la phase d’enquête et, évidemment, les peines étaient toujours décidées par des juges indépendants qui souvent rejetaient les demandes de l’accusation parce qu’elles n’étaient pas fondées sur des preuves suffisantes », dit-il.
Ce n’est pas la première fois que Ferrajoli critique la démarche de Moro et des procureurs du Paraná. Dans une lettre publiée dans ConJur en 2018, il s’est dit préoccupé par «l’aspect inquisitoire singulier du procès pénal brésilien» et la confusion «entre la fonction de jugement et la fonction d’instruction».
“L’impression que suscite ce procès dans un vaste secteur de la culture juridique démocratique italienne est celle d’une impressionnante absence d’impartialité de la part des juges et des procureurs qui l’ont promu”, avait-il déclaré à l’époque.
Soupçon
Apparemment, l’action sur la suspicion de Moro, en cours d’analyse dans le 2e collège de la Cour Suprême Fédérale, devrait être jugée plus tard cette année. Si l’ancien magistrat de la 13e Cour fédérale de Curitiba est jugé suspect, le procès de l’ex-président Lula retourne à la phase de mise en accusation et le militant du PT peut à nouveau être candidat.
Le procès contre Moro a été mis en route après que The Intercept Brasil ait révélé des échanges de messages entre lui et les avocats du soi-disant «groupe de travail du lava jato» à Curitiba. Dans les conversations, les fonctions de mise en accusation et de jugement se confondent.
L’ancien juge, par exemple, a guidé le travail des procureurs et a exigé de l’efficacité de la “task force”, allant même jusqu’à ordonner des opérations de perquisition et saisie au domicile des suspects sans requête du ministère public.
En 2016, Moro a même reçu un témoignage inachevée de la Police Militaire. Après avoir été couvert par l’ancien juge, l’avocat Deltan Dallagnol a envoyé l’article sans examen afin que Moro puisse prévoir une sentence.
Conjur | Traduit par Francis Gast