Lula emprisonné et la démocratie meurtrie
Un poème du pasteur Martin Niemöller, qui a inspiré Bertold Brecht et Eduardo Alves da Costa, est devenu le symbole de la critique à l’indifférence face au nazisme. Pendant ces moments historiques dans lesquels des valeurs sont en jeu, l’indifférence devient dramatique et mène au chaos. Ça a été comme ça pour l’Allemagne de 1930, et c’est valide aujourd’hui.
“Quand les nazis ont emmené les communistes, je me suis tu,
parce qu’au fond, je n’étais pas communiste.
Quand ils ont pris les sociaux-démocrates, je me suis tu,
parce qu’au fond, je n’étais pas social-démocrate.
Quand ils ont pris les syndicalistes, je me suis tu,
parce qu’au fond, je n’étais pas syndicaliste.
Quand ils ont pris les juifs, je me suis tu,
parce qu’au fond, je n’étais pas juif.
Quand ils m’ont pris, il ne restait plus personne pour protester.”
La prison de Lula a fêté ce mardi 20/08/2019 ses 500 jours d’illégalité et d’infraction contre l’État de Droit démocratique. Elle représente le manque de respect aux garanties constitutionnelles, au légitime procès légal, à la présomption d’innocence et aux droits humains. C’est une menace. Si Lula est emprisonné illégalement, n’importe qui peut l’être. Tout a commencé par le coup d’État en 2016, sans qu’il n’ait commis aucun crime.
C’est tout l’acte inaugural d’un processus de destruction de la démocratie. Et ça en est resté là.
Hormis les progressistes et les démocrates, face au coup d’état et à la prison de Lula, pendant que se concoctait l’injustice contre un innocent, beaucoup de monde a arrêté de réagir. Sa seule transgression est d’avoir été le grand leader le plus populaire de l’histoire du Brésil. Maintenant, après les révélations du site The Intercept, tout le monde sait que Lula a été victime d’un complot pour détruire sa réputation et lui voler sa liberté.
Le juge qui l’a condamné est celui qui a mis sur écoute une communication téléphonique entre l’ex-président et moi et a passé l’enregistrement à la chaîne TV Globo. C’est un crime sérieux, mais qui a seulement été admonesté. Et ça en est resté là.
Le même juge qui a condamné Lula a validé la dénonciation obtenue sous pression d’un chef d’entreprise qui, auparavant, avait dit que l’ex-président était innocent. Obtenue par intimidation, cette dénonciation fut la base de la condamnation. Et cet abus l’a emporté.
Pour donner un sens à cette sentence, le juge a plaidé qu’il condamnait Lula pour des “actes indéterminés”. Même l’opération Lavage-Express a confessé ne pas avoir de preuves. Mais même cette extravagance judiciaire l’a emporté.
Avec Lula déjà en prison, ce juge a suspendu ses propres vacances pour forcer la Police Fédérale à désobéir à la décision du juge qui avait ordonné sa libération. Et de la même façon que les situations antérieures, cet abus n’a pas été repris.
En 2018, la semaine du 2ème tour des élections, le juge a laissé filtrer la dénonciation rejetée par les procureurs, ce qui a conforté la victoire de l’extrême droite. Et la Justice n’a rien fait.
Après l’élection, le juge a été invité à devenir ministre du président élu grâce à ses interventions illégales. Et ça en est resté là.
Maintenant, le mal est fait. Le Brésil est en train d’être dévasté par un gouvernement néo fasciste dans sa politique et néolibéral dans son économie, mené par un président scatologique et intolérant. Pris en flagrant délit de partialité, le juge et les procureurs qui se sont unis en collusion pour condamner Lula, détruire l’économie et écraser la Justice nient ce qui ne peut être nié. Ils démentent ce qui ne peut être démenti.
Le résultat est honteux: un innocent est prisonnier et un néofasciste sans aucune préparation est au pouvoir.
Il n’y aura justice que lorsque ce jugement sera annulé et Lula absous.
#LulaLibre est un impératif moral, une exigence civilisatoire, un acte de justice que le Judiciaire ne peut pas dénier à un innocent. Encore plus quand l’innocent est le seul capable de pacifier le pays. Libre pour promouvoir l’entente, Lula amènera le Brésil à unir les forces sociales, sans exclusion, dans un front pour la démocratie, la souveraineté et les droits du peuple. Un tel front va chercher la sortie de la crise internationale, politique et économique dans laquelle a été jetée le Brésil par le coup d’État de 2016, par la prison de Lula et l’élection de Bolsonaro.
#LulaLibre est un cri d’espoir pour que nous arrêtions d’être un pays en feu, contaminé par la haine et gouverné par l’insensibilité, pour redevenir une nation viable, socialement juste et généreuse avec son peuple.
#LulaLibre signifie paix et démocratie pour le Brésil.
Folha de S. Paulo | Traduit par Marc Cabioch.